5 bonnes raisons de choisir Le mari de mon frère

Je n’avais rien de prévu pour la sortie du nouveau titre de Gengoroh Tagame aux éditions Akata, entre autre parce que j’ai déjà écrit deux autres billets sur le sujet, en septembre 2015 et en juin dernier. Je me lance donc à l’aveugle dans un article totalement improvisé. C’est parti !mari-frere-1

1°) C’est le premier titre grand public de Gengoroh Tagame.

Eh oui. Malgré le résumé et l’auteur, ce n’est ni un yaoi, ni un manga gay. Pour ceux qui connaissent déjà Gengoroh Tagame, c’est surprenant, mais ceux qui découvrent le mangaka avec ce titre ne verront rien d’exceptionnel dans cette classification. Prépublié dans le magasine seinen « Manga Action » des éditions Futabasha, Le mari de mon frère est un seinen (oui, je sais, c’est surprenant). Si vous le trouvez au rayon BL/yaoi de votre librairie, vous pouvez hurler. Il n’y a pas d’histoire d’amour : Mike Flanagan, le mari du frère de Yaichi, est veuf. L’histoire débute lorsqu’il se rend au Japon.

2°) La thématique abordée.

Rares sont les mangas qui abordent le thème de l’homosexualité, oups, non, de l’homophobie. Car ici, on n’a pas un couple gay avec une petite fille. Le titre, c’est Le mari de mon frère. Pas « mon frère est marié à un homme » ou « mon frère et son mari ». Le récit ne se centre donc pas sur un couple, mais sur un individu, Yaichi. C’est lui le héros qui vivait tranquillement jusqu’à ce que ce fameux mari, celui de son frère jumeau mort récemment, débarque au Japon. Yaichi va rapidement se rendre compte qu’il était bourré de préjugés, principalement dus à la société qui nous entoure, 100% hétérocentrée, et à son ignorance totale du sujet.

3°) L’éditeur français.

Cela ne pourrait pas paraître si important, mais ça l’est, puisque cela impacte toute la publication française. Vous imaginez ce titre chez Panini ? Moi non plus.

Akata a fait du bon boulot sur ce premier tome : pages couleurs, traduction fluide et adéquate de Bruno Pham avec les différents niveaux de langage et approximation à retranscrire entre le japonais et l’anglais. Les points « culture gay » sont conservés. Mais pas actualisés, par exemple, le mariage pour les couples de même sexe est désormais légal dans les 50 états des USA (heureusement que c’est précisé « avril 2015 »). Du coup, j’espère que l’erreur de typographie dans le tome 2 sera quand même corrigé (un 1987 qui devrait être 1978).

Sinon, on sait que Akata aime avoir une politique d’auteur (il ont réussi à avoir Ugly Princess de Natsumi Aida malgré leur séparation du groupe Delcourt). Donc si Le mari de mon frère fonctionne bien dans ses ventes, d’autres titres de Gengoroh Tagame pourrait suivre (comment ça, « non » ?) !

4°) La famille au sens large.

On découvre dès les premières pages que Yaichi est un père au foyer, et c’est là qu’on peut se rendre compte que Gengoroh Tagame est malin. Comme si évoquer les préjugés homophobes ne suffisait pas, il enchaîne sur les conceptions sexistes que l’on se fait sur la famille et les rôles genrés. Les statistiques le prouvent encore, ce sont les femmes qui en font le plus dans la maison, alors que les hommes se consacrent au bricolage et jardinage (genre, il y a tout le temps besoin de réparer quelque chose et tout le monde a un jardin, bien sûr…). Alors montrer un homme au foyer, faisant ménage, cuisine et lessive, cela bouscule les mentalités !

Avec Yaichi, seul pour s’occuper de sa fille, le manga pose également de manière indirecte une grande interrogation : l’absence de la mère. Yaichi est-il lui aussi veuf ? Divorcé ? Ou simplement séparé ?

Pour Yaichi, voir le mari de son frère, cela lui rappelle évidemment sa vie passée avec Ryôji, son jumeau désormais disparu. Eux qui étaient si proches enfants, comment ont-ils pu laisser la vie les éloigner, à tel point que Ryôji s’est exilé au Canada ? La réaction de Yaichi face à l’homosexualité de son jumeau y serait-elle pour quelque chose ?

Frère, père, mère, enfant, mari, femme, il s’agit bien de la famille au centre du récit, mais pas celle qu’idéalise une certaine frange de la classe politique (pour ne pas les citer).

5°) Le talent graphique de Tagame.

Marre des bishônens imberbes et filiformes qui envahissent vos shôjos et même vos shônens ? Ce titre est fait pour vous ! Ici, les hommes sont grands, musclés, gras, barbus et poilus !

Mais il n’y a pas que ça. Gengoroh Tagame a le soucis du détail, que ce soit dans les décors ou dans l’habillement de ses personnages (à chaque jour, sa tenue, contrairement aux héros de shônen !). Aussi surprenant que cela puisse paraître, le mangaka sait aussi dessiner les enfants de manière réaliste et mignonne.

Détails techniques :
Titre : Le mari de mon frère
Auteur : Gengoroh Tagame
Editeur : Akata
Série en cours avec (bientôt) 3 tomes au Japon

Autre chronique dispo sur Aftermangaverse, par Morgan.

6 réflexions sur « 5 bonnes raisons de choisir Le mari de mon frère »

  1. J’avais vite fait vu le nom je ne sais plus ou, mais sans vraiment m’intéresser, cependant je dois bien avouer que ta critique me donne envie de découvrir davantage cette oeuvre 🙂

  2. « Marre des bishônens imberbes et filiformes qui envahissent vos shôjos et même vos shônens ? »

    Jamais de la vie ! J’ai hâte de retrouver des personnages comme Shiro ou Kurapika, après tout ce temps. Puis j’avance dans L’ère des cristaux (tu connais ?) et je finis Sidonia, laisse-moi avec mes androgynes non-genrés (paradoxe ?) préférés. Et Attends-moi à Udagawachou, t’y penses hein ? Moi oui ! Sors vite te travestir mon petit manga de Hideyoshico (dont il faut lire le dojin sur Yotsuba).

    (Mais j’ai hâte de recevoir et lire Le mari de mon frère.)

  3. Bonjour,
    j’ai réellement bien fait de lire cet article. A vrai dire, je ne m’étais jamais réellement intéressé personnellement à cette oeuvre. Mais tes raisons on suffit à piquer ma curiosité.

    Je dois t’avouer que « Marre des bishônens imberbes et filiformes qui envahissent vos shôjos et même vos shônens ?  » m’a plutôt fais rire. Pas très grande lectrice de shôjos, je dois t’avouer que je n’ai jamais fais attention dans les shônens. A moins que Sebastian tiré de Black Butler soit l’un de ses fameux bishônens. A réfléchir.

    Cordialement, Euphox.

    1. Sebastian est clairement un bishônen (d’autant plus que Black Butler est un shônen dessiné par un femme est essentiellement destiné à un public féminin).

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